En vue de l’année 2019, Saucony a refait sa garde-robes. Et pour l’un de ses modèles phares de la marque étasunienne, la Kinvara, il s’agissait de la dixième mouture. Si les années ont passé, que les modes de confection ont quelque peu évolués, tout comme les matériaux composant les semelles, la chaussure n’a pas changé ses piliers : drop réduit, légèreté et confort.
Un petit peu d’histoire
Pour commencer, voici quelques petits rappels historiques. La marque doit son nom à la « Saucony creek », un ruisseau bordant Kutztown, dans l’état de Pennsylvanie, où se situait la première usine du groupe. Le logo reprend d’ailleurs la forme en « s » du cours d’eau avec les trois petits points symbolisant les rochers couchés dans son lit.
Quant à Kinvara, le nom vient du pays d’origine des fondateurs, l’Irlande, et d’un village dans le Comté de Galway situé non loin d’un lac cher à Michel Sardou. Les décideurs de Saucony trouvaient aussi que le mot Kinvara sonnait bien avec l’idée de vitesse qu’ils souhaitaient donner à leur nouvelle chaussure.
Un créneau à prendre entre maximaliste et minimaliste
Dans les années 2000, le marché des chaussures de running se divise pratiquement en trois catégories distinctes : les « maximalistes « avec leurs gros talons, les « racers » et les « minimalistes » avec notamment l’apparition d’une chaussure à doigts, la FiveFingers. Avec le lancement de la Kinvara en 2009, Saucony entend bien séduire les coureurs souhaitant peu à peu se diriger vers le « minimalisme », gagner en vitesse mais tout en préservant le confort que ne leur donne pas une chaussure de type « racer ».
Le succès est immédiat pour Saucony puisque sa Kinvara s’installe très rapidement sur le podium des chaussures les plus vendues au pays de l’Oncle Sam. Mais en Europe, des marques comme Brooks et Saucony ne bénéficient pas de la même notoriété dans un marché où les Japonais trustent les ventes avec notamment Asics. Mais au fil des années, la Kinvara trouve aussi ses adeptes sur le Vieux Continent, eux aussi séduits par le dynamisme et le confort de la chaussure.
Le drop 4 mm comme marque de fabrique
Si les couleurs, la confection et les matériaux employés pour la semelle ont évolué depuis 2009, le drop de 4mm reste une constante sur le modèle, une signature. De quoi pratiquement classer la Kinvara parmi les chaussures « minimalistes », ce qu’elle n’est pourtant pas. Les 4 mm vont forcément ramener votre foulée vers l’avant du pied et solliciter vos mollets pour donner plus de dynamisme à votre foulée. Mais le confort de sa semelle est bien supérieur à celui d’une Five Fingers.
La semelle est en effet épaisse de 19 centimètres sur la zone avant du pied et de 23 mm sur le talon. De quoi offrir un amorti intéressant, surtout pour le coureur qui voudrait utiliser ses Kinvara pour des distances plus longues, y compris le marathon. En prenant un peu de hauteur, la Kinvara va dans le même sens que la marque Topo (dont nous vous avions fait un test voici peu) qui propose aussi des chaussures aux drops nuls mais avec une belle épaisseur de semelle intermédiaire.
Si l’on se réfère à l’indice minimaliste établi par la « Clinique du coureur » ,notre Kinvara obtient un score de 63% là où la chaussure minimaliste pure doit obtenir 100%. On se trouve bien en face d’une chaussure qui veut vous aider à faire votre transition mais pas plus.
Inutile de penser que vous êtes quasiment un « barefoot runner » avec vos Kinvara aux pieds. Il vous suffit par exemple d’enfiler le modèle Type A, lui aussi de Saucony, pour comprendre la différence entre une vraie minimaliste avec 4 mm de drop et une chaussure de transition.
Fini l’abus d’Everun
Là où Adidas a voulu révolutionner l’amorti avec son Boost et New Balance avec son Fresh Foam, Saucony a opté pour l’Everun : un matériau magique qui a pour mission de bien restituer l’énergie tout en apportant du dynamisme et de la constance à votre foulée malgré la répétition des impacts.
Sur la Kinvara 7, l’Everun était principalement situé sur le talon afin de soulager les coureurs de longues distances dans les fins de course où la fatigue leur fait oublier la foulée fluide de l’avant-médio pied. Vu les retours positifs quant à cette nouvelle mousse, Saucony décida de mettre de l’Everun sur toute la semelle de la 8e édition de son modèle. Mais les critiques furent beaucoup moins dithyrambiques. Certains coureurs, dont pas mal de fans de la première heure, reprochaient à l’amorti d’être trop mou et de manquer de contrôle sur la pose de l’avant du pied.
Du coup, depuis la 9e mouture, la Kinvara est revenue à un amorti plus ferme qui procure des sensations plus naturelles. Les chaussures ont aussi gagné en flexibilité sur l’avant du pied pour permettre à la foulée d’être beaucoup plus libre.
L’empeigne a aussi été améliorée pour être plus légère et respirante. La matière légère et résistante a été fusionnée à la tige pour limiter le nombre de superpositions dans la chaussure. Le résultat ? Une chaussure souple et sans coutures qui limite les zones de frottements pour le pied et s’avère aussi plus solide sur la durée. Les coureurs ayant porté les précédents modèles de Kinvara savent qu’à l’époque il ne fallait pas beaucoup de kilomètres pour que les premiers trous fassent leur apparition sur leurs chaussures. Frustrant quand vos runnings sortent à peine de leur boîte.
La légèreté toujours présente, le grip efficace
Le chaussant offre pas mal de place pour les orteils. Le pied est bien enveloppé et maintenu. Le dynamisme n’en est pas impacté puisque les relances se font avec beaucoup de facilité. A noter l’ajout de petites mousses juste en dessous des zones où se trouve la malléole. Elles apportent plus de sensation de stabilité, ce qui se ressent notamment sur des parties un peu plus « techniques » comme des pavés ou des cailloux.
Bien qu’urbaine, la Kinvara ne sera pas à la ramasse sur les chemins de forêts rendus un peu glissants par les pluies qui s’invitent sur notre beau pays en ce début d’hiver. Nos premières sorties, effectuées dans des conditions humides, nous ont permis de constater que la Kinvara gardait la route aussi bien sur le bitume que sur les sentiers balisés et les rues pavées. Ce dernier type de revêtement a aussi permis de ressentir toute la stabilité de la chaussure et son excellent maintien de la cheville.
Retour aux sources pour le look
Si ces dernières années, Saucony s’était distingué avec des modèles aux couleurs fluos qui présentaient le double avantage de vous rendre visible pendant la nuit et de donner une crise d’épilepsie à ceux qui vous suivaient lors d’une compétition, la marque américaine a cette fois opté pour plus de sobriété en proposant aussi des versions « streetwear » de ses modèles running.
Pour son 10e opus, la Kinvara revient même aux sources puisque la première mouture présentait aussi une semelle rouge et un mesh principalement blanc avec quelques nuances de gris (pas 50 non plus). Attention, il s’agit d’une version limitée et il vous faudra aimer l’orange plus fluo avec quelques touches de bleu si vous voulez choisir l’édition classique.
Alors cette Kinvara 10 un bon cru ?
La Kinvara souffle ses 10 bougies avec un modèle qui s’inscrit parfaitement dans la lignée de ses devancières. On les utilisera toujours pour nos sorties rapides, nos compétitions courtes distances ainsi que du fractionné sur piste.
Dynamiques et légères, leur confort et leur stabilité ont été améliorés sans trop dénaturer la volonté d’aller vers une optique minimaliste. Les Kinvara laissent surtout de plus en plus la possibilité à leurs aficionados de pouvoir disposer de la sécurité et protection nécessaire sur les fins de marathons là où les vraies chaussures minimalistes et racers risquent de faire payer un excès de talonnage dit « de fatigue ». Quand on vous dit que plus que jamais les Saucony Kinvara restent des chaussures de transition.
F.Chl.